Après avoir entendu l’OST de Tales of Legendia, on pensait connaître le style de Go Shiina, à savoir un cocktail détonant entre musique orchestrale et jazz, rock, fusion. Pourtant, à la première écoute, la bande-son de God Eater a de quoi dérouter même les oreilles averties.
Dès les premières pistes, pas de doutes, on a bien affaire à du Go Shiina : la mélodie de l’orchestrale «Tearing Up the Storm» et la jazzy «Adult Time -Romance Mix-» semblent tout droit exportées de Tales of Legendia, mais la qualité étant similaire, ce n’est pas vraiment un problème. C’est à partir de la 5è musique du premier CD que Shiina commence à se lâcher, et part dans un trip orchestral expérimental encore plus poussé qu’auparavant, imposant des voix auto-tunées sur beaucoup de pistes. Les allergiques à ce procédé, avec lequel il s’amusait déjà sur l’étrange «Short Circuit» de ToL, devront prendre leur mal en patience tout au long de cette OST.
«Gods’ Table», dans laquelle se mélange orchestre, gros beat techno, voix auto-tunée et une sorte de chœur tribal, témoigne de la furie créative du compositeur, qui pourra paraître indigeste pour certains. Cette créativité, il en fait preuve autant dans la composition et le choix des instruments que dans le mixage, comme par exemple sur la magnifique «Ephemeral Wish», où il rajoute un effet de vieux gramophone par-dessus le piano, puis le retire pour laisser éclater la mélodie, le piano étant rejoint par le reste de l’orchestre : le résultat est saisissant.
Au long de ces deux disques, Shiina brasse de l’orchestral, du jazz, de l’éléctro, du (j-)rock symphonique (la un peu kitsch mais prenante «No Way Back») et même du flamenco («Flame Dance») et une bonne dose de world music, et fait preuve d’une grande diversité dans l’instrumentation et les types de chants. Tout en restant cohérent, mélodique et thématique. A ce propos, la chanson thème du jeu «God and Man Vocal Ver.» qui clôt le premier CD, superbement interprétée par Donna Burke, s’impose à mes oreilles comme l’une des ses plus belles et émouvantes compositions.
Pour pinailler un peu, on peut pointer le fait qu’il y a peut-être un peu trop de reprises dont les arrangements ne sont pas flagrants sur le deuxième disque, et que Shiina en fait parfois un peu trop, notamment sur l’utilisation des voix auto-tunées. Quoi qu’il en soit, sans être autant un chef d’œuvre que l’OST de Tales of Legendia, celle de God Eater est l’une des meilleures de l’année 2010 : variée, surprenante et bénéficiant de la puissance de l’orchestre (d’ailleurs, «Deo Volente» !), elle nécessite plusieurs écoutes avant de pleinement s’apprécier et confirme que Go Shiina est l’un des plus créatifs et talentueux compositeurs japonais de ces dernières années. Allez, qu’on lui confie des projets d’un peu plus d’ampleur qu’un Tales of ou un Monster Hunter-like sur portable !
Appréciation : Très bon