Suite à la publication des chiffres de l’enquête de Gamasutra sur les revenus moyens annuels des développeurs de jeu en 2014, qui plaçait les professionnels du son en seconde position avec un score (trop beau pour être vrai) de 95.682$, les organisateurs de la GameSoundCon ont procédé à une étude plus approfondie sur le domaine et nous livrent leurs résultats. On apprend ainsi que le sondage de Gamasutra était faussé par le faible nombre de participants du secteur audio (33 professionnels) et leur forte tendance à faire partie des « seniors », dont le salaire diffère évidement des jeunes recrues. Aussi, l’enquête faisant inévitablement une moyenne de l’ensemble des salaires ne pouvait témoigner des nuances de revenus, parfois très fortes selon les statuts.
Des chiffres à adapter selon les situations
En effet, comme l’indiquent les auteurs au début du compte rendu, pour que l’enquête soit réellement représentative, il a fallu classer les chiffres donnés par les 518 sondés selon deux critères principaux. Dans un premier temps, ils ont différencié les types de projets sur lesquels ces derniers travaillaient. Il est évident que, les blockbusters ne réclamant pas le même budget que les jeux indépendants, les salaires peuvent suivre en conséquence. Ils ont donc définis trois catégories de jeux : les gros budgets, les jeux plus modestes réalisés par de grosses entreprises, et bien sûr les productions indépendantes.
Puis, afin de bien différencier les types de revenus, ils ont catégorisé trois grands statuts parmi les professionnels : les employés salariés, les freelancers travaillant à la commande (eux-mêmes répartis entre ceux embauchés sur des projets à gros budgets et ceux travaillant sur des jeux plus modestes ou indépendants), et enfin les purs indépendants conservant donc les pleins droits sur leur travail. Bien que ces catégories restent floues et puissent encore être nuancées selon les auteurs, elles permettent tout de même d’avoir un bon aperçu du fossé qui se creuse d’une situation à l’autre.
Du plus grand au(x) plus petit(s)
Si ce que l’on constate à la première lecture peut d’abord sembler évident, comme par exemple le fait que les indépendants « loués » sur des gros projets comptabilisent globalement le plus d’années d’expérience, les plus hauts cachets, et la plus faible activité (en nombre de jeux créés à l’année), d’autres chiffres plus intéressants pointent le bout de leur nez. Ainsi, malgré les quelques gros bonnets qui sont sans doute à l’origine des tarifs exorbitants publiés par Gamasutra, le milieu de l’indépendant est loin d’être rose, avec en général une moyenne de 28.091$ par projet, mais une majorité de personnes gagnant moins de 10.000$ (la médiane se trouvant à 5.918). Combinés avec la moyenne de jeux réalisés qui tourne autour des 5 pour cette catégorie, on tombe rapidement en dessous des 50.000$ gagnés par an. De même, les compositeurs salariés sont loin d’atteindre les revenus annoncés initialement, puisque leur moyenne plafonne autour des 70.000$ par an.
Plus l’on se rapproche de l’indépendant pur et plus les revenus rapportés par un jeu baissent : les professionnels totalement libres gagnent ainsi généralement moins de 5.000 dollars par jeu, avec une majorité en-dessous des 1.500$ par projet. Par conséquent, les compositeurs indépendants travaillent généralement sur plus de jeux que les autres, sans doute parce que ces derniers demandent moins de temps d’investissement que les travaux plus importants, mais également parce qu’ils doivent bien vivre ! Malgré tout, ceux-ci gagnent beaucoup moins que leur congénères puisque leur record de 5 à 6 jeux créés peine à atteindre les 10.000$ de revenu annuel. Avec quelques failles inhérentes aux calculs statistiques, le tir a tout de même été rectifié et permet d’éviter les jugements hâtifs que le premier sondage pouvait provoquer. Et au passage, on grappille également quelques informations numériques intéressantes sur les métiers du son dans les jeux vidéo…
D’autres chiffres en vrac
- La majorité des professionnels sont indépendants (presque 60% contre 37% de salariés)
- Plus de la moitié des compositeurs s’occupent aussi des effets sonores (mais seulement 20% le font sur les blockbusters)
- 96% des professionnels sont des hommes
- 70% des musiques de jeux sont créées de façon totalement virtuelle ou avec le compositeur comme seul musicien
- Seuls 46% des jeux à gros budgets bénéficient d’une bande-son enregistrée par 5 musiciens ou plus
- 95% des musiques de jeux à gros budgets sont composées sous des conditions de WFH
Pour les curieux souhaitant approfondir ces données et avoir accès à tous les graphiques, tout est directement consultable en ligne sur ce document.