Nous en parlions il y a quelques temps, les compositrices Manami Kiyota et Kumi Tanioka donneront ensembles un concert nommé Trick or Music le 29 octobre prochain. Comme expliqué auparavant, le concert débutera à 14h00 au bar Koen Dori Classics à Shibuya, et les spectateurs auront le plaisir d’écouter, entre autres, des musiques de Final Fantasy XI, Final Fantasy Crystal Chronicles et Xenoblade. Afin de rappeler que l’évènement approche à grands pas, les deux artistes nous ont gratifié d’une vidéo annonçant le concert :
Vous souvenez-vous du concert KEYS OF GAME organisé par Dog Ear Records le 1er mars de cette année ? Ce concert n’avait malheureusement pas fait l’objet d’une publication en disque ou d’une diffusion en streaming. Grâce à la vidéo ci-dessus, nous apprenons que tous les spectateurs présents au concert Trick or Music recevront en cadeau un CD comprenant la piste « Hoshi no Yurikago » (le berceau des étoiles) jouée au KEYS OF GAME. Cette chanson est composée par Kumi Tanioka et interprétée par Manami Kiyota, également parolière de l’œuvre. Faute de mieux, aucune diffusion de ce disque n’est prévue hors de la représentation du 29 octobre.
Le 14 août dernier, Clément et moi-même nous sommes rendus pour la première fois à un concert Press Start, le sixième de la série depuis sa création en 2006.
Ce qui donne sa couleur à ce concert, c’est d’abord son programme, presque exclusivement constitué de musiques de jeux japonais, dans la lignée des Game Music Concerts (1991 à 1996), mais aussi son comité de production composé de personnalités toutes en lien avec le jeu vidéo : Kazushige Nojima (scénariste), Nobuo Uematsu (compositeur), Masahiro Sakurai (créateur), Shôgo Sakai (orchestrateur et compositeur) et Taizô Takemoto (chef d’orchestre).
Cette année, il faut avouer que l’on attendait particulièrement le trio Xenoblade, NieR et El Shaddai, trois jolies révélations de l’année passée, et on n’a pas été déçu. La participation de Tomori Kudô, Chico (ACE) et de Manami Kiyota en tant qu’interprètes a ajouté plus de puissance à un medley Xenoblade déjà très vivant et varié. Certains diront que c’était « trop proche des versions originales », on leur répondra que l’argument semble un peu désuet en 2011, alors que la plupart des musiques de jeu sont enregistrées en studio ou avec des instruments virtuels extrêmement réalistes. De la même façon, le medley NieR a bénéficié de la douce voix d’Emi Evans, sans qui la musique de MoNACA n’aurait pas la même couleur, pour un résultat enchanteur. Si le medley d’El Shaddai n’a vu personne s’ajouter à l’orchestre philharmonique de Kanagawa, la patte du compositeur Masato Kouda était elle bien perceptible, comme s’il était présent sur scène. C’était personnellement mon premier contact avec la musique de ce jeu, mais il a été suffisamment fort pour estomper les critiques un peu fraîches entendues à son sujet et je jure d’y jeter une oreille attentive dès que j’en aurai l’occasion.
En dehors de ce trio gagnant, le medley Final Fantasy IV et « Toberu Mono » comptent parmi les succès « gagnés d’avance » du concert. Le premier a été l’occasion d’apprécier à l’orchestre la superbe « Into the Darkness », le thème de combat, le « thème principal » (thème de carte) ou encore « Rydia » ; le second d’entendre une interprétation très fidèle de la chanson-thème de The Last Story par la chanteuse Kanon. Lors de la séance du soir, ces deux pièces ont d’ailleurs été jouées sous les yeux du créateur des jeux en question, Hironobu Sakaguchi, qui a même été appelé sur scène pour une discussion très détendue avec Uematsu et Nojima.
L’orchestration de Spelunker n’avait rien de bien surprenant car ses mélodies ont été fidèlement reproduites, un peu comme dans l’album Pia-Com II, mais le public a beaucoup ri en réaction à l’apparition récurrente et inopinée du thème de « Game Over ». Même sans avoir fait le jeu, on pouvait deviner qu’il avait de quoi « offrir du challenge aux aficionados de jeux de shoot », comme disent les journalistes.
En rappel, pas un mais deux morceaux ! Le premier, un medley Xenogears, a arraché des cris de surprise à de nombreux spectateurs et de beaux souvenirs à bien d’autres. Le second, un medley Kid Icarus, m’a fait hurler de joie – intérieurement –, car j’adore Hirokazu Tanaka, dont la musique est rarement interprétée à l’orchestre.
Petit bémol personnel : certaines pièces m’ont semblé un peu décousues, notamment le medley Super Mario Galaxy… Difficile de dire néanmoins si cette impression de musique un peu brouillonne est de la responsabilité de l’orchestrateur, de l’orchestre (pas toujours irréprochable, cf. Distant Worlds Returning Home), du chef Takemoto… Ou d’une oreille moins concentrée à ces moments du concert ! Je n’oserai donc pas d’avis sur ces points. Cela étant, je suis en mesure de dire que Press Start était une belle fête pour les amateurs de musique de jeu d’hier et d’aujourd’hui et qu’il était difficile d’en sortir en faisant la grimace, quand bien même on aurait assisté aux sommets que sont Symphonic Fantasies, Legends et Odysseys les années passées, comme Clément et moi. Dans le hall d’entrée du Shinjuku Bunka Center, il était possible de mettre la main sur des bandes originales aux stands de Dog Ear Records et Procyon Studio mais aussi de croiser quelques personnalités comme Yôko Shimomura ou encore Nobuyoshi Sano, lui-même animateur/vendeur sur le petit stand de Detune. Nous en avons aussi profité pour saluer l’ami Dayotan, l’organisateur du festival 4star Orchestra dont il sera bientôt question sur le site !
Super Rare Trax Land of the Rising Sun est le troisième album de l’ancien collectif de compositeurs de musique de jeu GeOnDan. Il a été mis en vente à au 4Star Orchestra à Tôkyô, du 30 septembre et 2 octobre 2011. Il s’agit d’un album caritatif dont les recettes ont été versées aux victimes du tsunami de mars 2011.
Album collaboratif de compositions originales.
Date de sortie : 30 septembre 2011 Prix : 2000 yens Référence : pas de référence (publié par GeOnDan)
Lorsque Xenoblade a été discrètement dévoilé à l’E3 2009 sous le nom provisoire de Modano: Beginning of the World, le mystère était encore grand autour de ce projet. Il existait pourtant une certitude à son sujet. En regardant la première vidéo montrée lors du salon, on reconnaissait sans mal la touche de Yôko Shimomura. Personne n’aurait pu deviner qu’elle allait en réalité être accompagnée de cinq autre compositeurs. Pour satisfaire les besoins de son jeu gigantesque, le réalisateur Tetsuya Takahashi (célèbre pour Xenogears et Xenosaga) a décidé de faire appel à une équipe musicale très large. Au final, la bande originale de Xenoblade compte pas moins de 90 morceaux. Comment Takahashi a-t-il constitué cette équipe inattendue ? Quels ont été les défis à relever pour assurer la cohérence du projet ?
De un à six
Yôko Shimomura était bel et bien le premier choix de Tetsuya Takahashi. Les deux créateurs se connaissent depuis l’époque de Square, où ils ont tous les deux travaillés plusieurs années. Ils n’ont été associés que sur un seul projet, Front Mission, en 1995. C’est pour apporter de la nouveauté par rapport à ses précédents jeux que Takahashi a porté son dévolu sur la compositrice, qui a finalement été chargée d’écrire le thème principal et les morceaux du début du jeu. Yasunori Mitsuda, collaborateur historique de Takahashi, n’est arrivé sur le projet que tard dans le développement, alors que le jeu venait d’être renommé en Xenoblade et que l’équipe cherchait quelqu’un pour écrire la chanson thème. C’est finalement assez naturellement qu’elle s’est tournée vers celui qui a déjà participé aux autres Xeno-. Mitsuda a ainsi composé la chanson de fin «Beyond the Sky».
Le format de la bande originale a néanmoins demandé aux développeurs de réfléchir à une équipe bien plus grande, notamment parce qu’ils voulaient que la musique change selon la situation : par exemple, selon le jour et la nuit ou l’état de santé des personnages en combat. Le gros des musiques a été composé par quatre musiciens peu connus dans le domaine : Manami Kiyota et le groupe ACE+ (CHiCO, Tomori Kudô et Kenji Hiramatsu). Tetsuya Takahashi les a rencontrés par le biais de Dog Ear Records, le label de Nobuo Uematsu, et leur a proposé d’écrire les musiques d’exploration et de cinématiques, avec comme tâche supplémentaire pour ACE+ de prendre en charge celles des combats. Ils n’ont pas hésité. Quand Kiyota a reçu la proposition de la part de Dog Ear, elle a bondi de joie. Elle était d’autant plus heureuse qu’elle allait travailler aux côtés de Shimomura et Mitsuda, dont elle a découvert les musiques en jouant à leurs jeux quand elle était encore au lycée.
Présentations
On ne présente plus Yôko Shimomura et Yasunori Mitsuda, qui sont devenus deux des noms les plus connus de la musique de jeu vidéo japonaise. Xenoblade est avant tout l’occasion de découvrir ses autres compositeurs, qui ont tous pour particularité d’avoir déjà travaillé pour Nintendo par le passé. Manami Kiyota, auteur-compositeur-interprète qui a déjà publié plusieurs albums solo, a en effet participé à la composition des musiques de PokéPark Wii avec Kenichi Koyano et Shigerô Yoshida. Elle a également interprété les chœurs du thème d’ouverture de Glory of Heracles sur DS. Xenoblade marque son premier projet majeur dans le domaine de la musique de jeu vidéo.
De son côté, le trio ACE+ est en réalité le duo ACE (CHiCO et Tomori Kudô) rejoint par Kenji Hiramatsu. Ces trois collaborateurs ont réalisé ensemble la bande originale du MMORPG Emil Chronicle Online mais la dénomination ACE+ est apparue pour la première fois à l’occasion de Xenoblade. CHiCO et Kudô ont travaillé pour Nintendo plusieurs fois, notamment pour Minna no Tamagochi World sur N64 et la série Robopon sur GameBoy. En 1999, ils se sont associés à Hiramatsu pour Bomberman 64: The Second Attack, aux côtés de Yasunori Mitsuda et Yoshitaka Hirota. Récemment, CHiCO a interprété la chanson thème de Luminous Arc 3 sur DS. De son côté, Hiramatsu est un grand fan de Nintendo et un joueur de longue date.
Unité et originalité
S’il fallait résumer les deux mots d’ordre de Tetsuya Takahashi, ce serait ceux-là. Le réalisateur a en effet fait de son mieux pour que les styles des compositeurs se rejoignent et pour que le joueur ne soit pas choqué par des changements trop brutaux. L’exigence de Takahashi était telle qu’il n’hésitait pas à refuser plusieurs fois un morceau avant que celui-ci soit exactement comme il le voulait. Il faut dire que, même s’il admet que la démarche peut sembler impolie, il allait jusqu’à donner à ses compositeurs des morceaux en guise d’exemple pour expliquer l’impression qu’il voulait donner à une scène. Une anecdote prouve toute l’exigence du réalisateur : pour le thème du prologue, il a demandé à Yôko Shimomura d’écrire une piste de 9 minutes qui colle exactement à l’action. Comme cela semblait trop difficile à la compositrice, il lui a finalement demandé de faire comme si elle écrivait deux pistes : «Prologue A» et «Prologue B». Pour Shimomura, ces deux pistes sont différentes en termes de rythmique mais partagent le même concept.
Bien sûr, le scénario n’en restait pas moins la meilleure source d’inspiration. Lorsqu’elle a découvert que l’histoire se déroulait sur deux géants fossilisés, Shimomura a par exemple ressenti une sensation étrange. Pour elle, ce monde inhabituel à la nature gigantesque et au ciel infini est ce qui fait toute la singularité de Xenoblade. Kenji Hiramatsu était lui aussi fasciné par l’immensité du jeu, notamment lorsqu’il a découvert qu’il pouvait se rendre jusqu’à la la falaise qu’il voyait au loin. CHiCO, elle, était si absorbée par le scénario qu’il lui arrivait d’en réciter les dialogues à voix haute. Pourtant, après sa première rencontre avec Tetsuya Takahashi, elle était restée sur une impression confuse du travail qu’elle devait accomplir. Alors que le réalisateur lui avait certifié qu’ils devaient tous travailler tout à fait naturellement, il avait précisé qu’il ne voulait pas qu’ils composent de la musique typée RPG.
L’une des directives de Takahashi était d’utiliser une grande variété d’instruments pour que le jeu ne semble pas monotone. Yôko Shimomura a par exemple cherché à utiliser des sonorités un peu différentes, telles que la guitare électrique ou des sons mécaniques, pour retranscrire la thématique de l’affrontement des humains contre les machines. Elle a tout de même intégré l’un de ses instruments préférés, le violon. Les autres compositeurs ont eux-mêmes participé à l’interprétation des différents morceaux. Manami Kiyota et CHiCO font les chœurs sur certaines pistes, tandis que Tomori Kudô et Kenji Hiramatsu jouent respectivement de la guitare et du synthétiseur. En fin de compte, le travail de longue haleine de Kiyota et ACE+ les a rapprochés à tel point qu’ils sont devenus bons amis. Ils se rendaient régulièrement les uns chez les autres pour se soutenir.
Au-delà du ciel
Tetsuya Takahashi ayant déjà travaillé plusieurs fois avec Yasunori Mitsuda par le passé, il savait qu’il pouvait lui faire confiance lorsqu’il lui a confié l’écriture de la chanson thème de Xenoblade. Au moment où la proposition est arrivée, le jeu était presque finalisé, ce qui a permis à Mitsuda de s’imprégner de tout le travail déjà réalisé. Sa première demande a été de lire le scénario entièrement, même s’il craignait ne pas avoir assez de temps pour cela. Lorsqu’il a atteint la dernière ligne, il s’est immédiatement dit que c’était bel et bien un jeu de Takahashi. L’idée de Mitsuda était de faire en sorte que sa chanson serve d’aboutissement à toutes les autres musiques du jeu, mais cela lui a posé quelques difficultés. Ce n’était pourtant que le début, car une fois la mélodie composée et la partie instrumentale enregistrée, il lui fallait avant tout trouver la bonne interprète. Ses recherches étant infructueuses, il alla même jusqu’à lancer un appel sur son blog en janvier 2010.
Au bout de plusieurs auditions, ils ont finalement retenu la chanteuse d’origine australienne Sarah Àlainn. Elle s’est distinguée des autres candidates en demandant à chanter directement en studio. Étonnamment, sa voix était différente de celle que Mitsuda attendait. Alors qu’il pensait faire chanter la musique par une interprète à la voix puissante, celle de Sarah Àlainn est plutôt classique. Comme Mitsuda est quelqu’un d’exigeant, il a fait réenregistrer la chanson plusieurs fois pendant un mois afin d’être sûr d’obtenir ce qu’il cherchait. Malgré tout, Àlainn a persisté jusqu’au bout pour donner naissance à la «Beyond the Sky» qui sert désormais de thème de fin à Xenoblade.
Longue de 4 CD et riche de 91 morceaux, la bande originale de Xenoblade a été publiée le 23 juin 2010 au Japon par le label Dog Ear Records.