Steve Reich (WTC 9/11)
Publié: 06 Sep 2011, 16:27
C'est sans doute un peu osé d'ouvrir cash un sujet aussi... JOYEUX et ACCESSIBLE sur ce forum, mais j'espère que vous m'en excuserez, car j'ai très envie de vous parler de ce compositeur que j'affectionne tout particulièrement et de sa dernière oeuvre en date : WTC 9/11. Le premier enregistrement de cet opus, interprété par le Kronos Quartet (vous savez, Requiem for a Dream !), est disponible en écoute intégrale sur internet depuis hier.
Steve Reich, pour ceux qui ne le saurait pas, est l'un des plus grands compositeurs de musique "savante" de notre époque, et est reconnu comme l'un des pionniers de la musique dite minimaliste, plus spécifiquement de la musique répétitive. Sa dernière création s'inscrit dans la lignée de ses recherches sur la mélodie du discours, qu'il avait entamé en 1988 avec Different Trains : la musique s'articule autour d'extraits de discours parlés enregistrés, doublés et répétés par les instruments présents sur scène (souvent l'alto et le violoncelle, en raison de la proximité de leurs timbres avec celui de la voix humaine). La particularité de WTC 9/11, c'est bien entendu que, comme son nom l'indique, la pièce est construite sur des enregistrements vocaux en rapport avec les attentats du 11 septembre 2001 : des communications des services de sécurité aérienne américains et des pompiers de New York, ainsi que des témoignages recueilli en 2010 par Reich lui-même auprès de son voisinage.
La partition est écrite pour trois quatuors à corde, auxquels viennent donc s'ajouter les enregistrements vocaux. On retrouve la rythmique pulsatile à laquelle on est habitué chez Reich, avec ces longs ostinatos qui forment un tapis rythmique hypnotisant sur lequel le reste de la musique vient s'appuyer. La composition est résolument dissonante, un fait surprenant, puisqu'il va à l'encontre des constructions plus mélodieuses vers lesquelles Reich semblait tendre avec ses derniers travaux (dont on peut trouver deux représentants sur l'album en écoute plus haut, pour comparaison).
Le résultat est, je trouve, d'une puissance assez indescriptible. Particulièrement anxiogène, il procure un sentiment de proximité, d'intimité avec les voix enregistrées extrêmement perturbant. L'émotion viscérale et violente dont ces voix sont emplies est amplifiée de façon spectaculaire par le travail de Reich, qui donne une image claire, mais jamais simple ni évidente, de la détresse qu'ont pu provoquer les funestes événements de ce jour. Depuis que j'ai écouté la pièce pour la première fois, il y a environ 24 heures, il m'est bien difficile de la chasser de mes pensées, et je sens que cela risque de durer encore quelques temps. Je réserve bien sur mon jugement pour l'instant, en attendant encore quelques nouvelles écoutes et le temps de "digérer" la chose. Mais quoi qu'il en soit, je vous recommande l'expérience. Et je crois bien, à quelques jours à peine des 10 ans des attentats, que Reich a réalisé là l'évocation la plus vibrante et la plus éloquente qui soit de l'événement.
Steve Reich, pour ceux qui ne le saurait pas, est l'un des plus grands compositeurs de musique "savante" de notre époque, et est reconnu comme l'un des pionniers de la musique dite minimaliste, plus spécifiquement de la musique répétitive. Sa dernière création s'inscrit dans la lignée de ses recherches sur la mélodie du discours, qu'il avait entamé en 1988 avec Different Trains : la musique s'articule autour d'extraits de discours parlés enregistrés, doublés et répétés par les instruments présents sur scène (souvent l'alto et le violoncelle, en raison de la proximité de leurs timbres avec celui de la voix humaine). La particularité de WTC 9/11, c'est bien entendu que, comme son nom l'indique, la pièce est construite sur des enregistrements vocaux en rapport avec les attentats du 11 septembre 2001 : des communications des services de sécurité aérienne américains et des pompiers de New York, ainsi que des témoignages recueilli en 2010 par Reich lui-même auprès de son voisinage.
La partition est écrite pour trois quatuors à corde, auxquels viennent donc s'ajouter les enregistrements vocaux. On retrouve la rythmique pulsatile à laquelle on est habitué chez Reich, avec ces longs ostinatos qui forment un tapis rythmique hypnotisant sur lequel le reste de la musique vient s'appuyer. La composition est résolument dissonante, un fait surprenant, puisqu'il va à l'encontre des constructions plus mélodieuses vers lesquelles Reich semblait tendre avec ses derniers travaux (dont on peut trouver deux représentants sur l'album en écoute plus haut, pour comparaison).
Le résultat est, je trouve, d'une puissance assez indescriptible. Particulièrement anxiogène, il procure un sentiment de proximité, d'intimité avec les voix enregistrées extrêmement perturbant. L'émotion viscérale et violente dont ces voix sont emplies est amplifiée de façon spectaculaire par le travail de Reich, qui donne une image claire, mais jamais simple ni évidente, de la détresse qu'ont pu provoquer les funestes événements de ce jour. Depuis que j'ai écouté la pièce pour la première fois, il y a environ 24 heures, il m'est bien difficile de la chasser de mes pensées, et je sens que cela risque de durer encore quelques temps. Je réserve bien sur mon jugement pour l'instant, en attendant encore quelques nouvelles écoutes et le temps de "digérer" la chose. Mais quoi qu'il en soit, je vous recommande l'expérience. Et je crois bien, à quelques jours à peine des 10 ans des attentats, que Reich a réalisé là l'évocation la plus vibrante et la plus éloquente qui soit de l'événement.